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[L'éventualité d'une reprise d'activité...]

Projet de lettre daté du 22 janvier 1934

Correspondence

Author

Author André Breton
People cited Louis Aragon, Adolf Hitler, Ernest Meissonier
Letter to Salvador Dalí

Description

Lettre d'André Breton à Salvador Dalí datée du 22 janvier 1934, conservée dans une chemise titrée « Question affaire Dalí ».

Ce brouillon d'une lettre à Dalí date des premiers moments d'une crise dont le pic reste à venir. Breton, en quatre feuillets serrés, demande au peintre des explications quant à ses propos pro-hitlériens. Derrière l'interrogation politique, ce sont en réalité des questions plus larges qui sont soulevées : aux yeux de Breton, qui se réclame en cela, dans sa lettre, de Dada, il ne saurait exister d'activité « artistique » pure. Toute activité artistique, toute activité d'un artiste, relevât-elle de la provocation, s'inscrit dans un rapport au monde non point gratuit, mais moral. La provocation, l'attaque contre les valeurs, les institutions, sont des activités relevant d'une morale contestataire qui choisit ses cibles et doit être distinguée de la bouffonnerie. L'esprit de sérieux propre à Breton, qui se donne ici à l'état brut, se révèle également dans sa portée face à l'Histoire. Certes, on pourrait s'amuser du vocabulaire militaire qu'il utilise (« démoraliser », par exemple, rappelle par trop Anasthasie et la Grande Guerre). Mais sans cette tenue qu'il revendique et demande à ses amis, d'une façon quelque peu martiale quelquefois, Breton n'aurait pu garder en politique cette lucidité qu'on ne saurait lui refuser. [site Atelier André Breton, 2005]

Lettre autographe signée à Salvador Dalí, Paris, le 22 janvier 1934.
- 4 pages in-12 manuscrites, titrée et datée à l'encre bleue par Breton : « Lettre à Dalí, Paris, le 22 janvier 1934 » constituant le premier jet d'une lettre très éclairante sur les relations Breton-Dalí ; nombreuses ratures et corrections.

Breton évoque la possibilité d'une « reprise d'activité qui nous serait vraiment commune (il s'agit notamment de la publication prochaine d'une nouvelle revue surréaliste)... Il pose à Dalí quelques questions personnelles concernant certains de ses propos extrêmement agitants :
« Le plus marquant fut qu'une catastrophe de chemin de fer vous causait une satisfaction d'autant plus grande qu'elle affectait plus spécialement les voyageurs de troisième classe », propos propres « à affaiblir durablement le Surréalisme. »

Breton lui reproche également des propos provocateurs sur le caractère « totalement irrationnel du phénomène hitlérien » et son refus de le combattre, « dans le cadre d'une organisation qui se définit révolutionnaire », ses récentes louanges « jeudi dernier chez Léon-Pierre Quint » du gouvernement nazi et taxe son comportement de « réactionnaire » en lui rappelant les engagements « catégoriques » pris par le surréalisme en faveur de la « révolution prolétarienne » et qui en constitue le « statut moral le plus clair  » et lui demande de consentir « à flatter un peu moins imprudemment l'opinion ». Breton demande à Dalí s'il serait prêt à signer un texte, dans le premier numéro de la nouvelle revue surréaliste, « de nature à dissiper l'émotion qu'ont pu faire naître certaines déclarations » (de caractère « paranoïaque-critique ») au sujet du fascisme allemand, et de faire ressortir que « sur la Révolution prolétarienne, il n'y a entre vous et nous désaccord fondamental ». Breton insiste enfin sur l'urgence d'obtenir de Dalí « une réponse écrite et très explicite à ces questions. Il y va de la possibilité pour moi de continuer à m'exprimer à côté de vous. Je n'ai pas cessé d'en avoir un extrême désir. Votre ami. André Breton  ». [catalogue de la vente, 2003]