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[Comme suite à votre lettre du 15 décembre...]

Lettre datée du 15 décembre 1924

Correspondence

Author

Author Maurice Martin du Gard
People cited Jacques Guenne, Frédéric Lefèvre
Letter to non identifié

Description

Lettre de Maurice Martin du Gard à « Monsieur le Gérant de La Révolution Surréaliste », datée de Paris, le 15 décembre 1924.

Provocateurs indéniables, Apaches du milieu littéraire, pourfendeurs d'Anatole France, les surréalistes n'en restent pas moins des éditeurs lucides et conscients des questions commerciales. Maurice Martin du Gard, l'influent co-directeur de l'hebdomaire Les Nouvelles littéraires qu'il a créé en 1922, répond ici à une lettre du 15 décembre, et accepte de voir dans le numéro de La Révolution surréaliste de janvier une publicité pour sa revue. On la trouvera en effet en troisième de couverture du numéro deux.

Ami de Gide, Maurice Martin du Gard a eu une influence éditoriale aujourd'hui quelque peu oubliée ; il a néanmoins côtoyé Valéry, Barrès, Colette, et son hebdomadaire, savante alliance de critiques, d'extraits et d'œuvres brèves, exerça un prestige et une présence inférieurs à la NRF mais néanmoins importants.

Breton, de fait, le connaissait bien : un article sur Pétrus Borel, intitulé « Le bouc émissaire du romantisme, Pétrus Borel (1809-1859) » paru le 10 novembre 1923, devait ouvrir une série de portraits de « Ceux dont on ne parle pas » (titre de Breton). Un brouillon de lettre  montre un Breton diligent et presque satisfait : « Les coupures qu’a nécessitées la longueur de mon article ne m’ont pas trop fait de peine. Je vous prie seulement à l’avenir de m’en prévenir, autant que possible. […] Ensuite, je vous remettrai successivement : Agrippa, Rabbe, Nouveau, Lewis, Reverdy, Poictevin, Mathurin, etc. » Satisfaction de façade, semble-t-il : dans une lettre à Simone Kahn du 11 novembre Breton se plaint beaucoup des coupes portant sur le préambule de l’article, très provocateur, et pourvu d'une pique virulente à l'égard de La Fontaine. Ces difficultés n’empêcheront pas l’auteur des Pas Perdus de donner aux Nouvelles littéraires - le 16 août 1924 - un article défendant André Malraux menacé d’incarcération pour vol d’œuvres d’art ; le 23 août, il donne « Rimbaud, Verlaine, Germain Nouveau d’après des documents inédits », qui détaille un manuscrit acheté par Doucet sur ses conseils. Mieux, il dédicace un exemplaire du Manifeste du surréalisme à Maurice Martin du Gard en septembre 1924.

La collaboration avec Les Nouvelles littéraires semblent donc s’imposer, d’autant plus qu’un compte rendu élogieux du Manifeste est paru dans l'hebdomadaire le 11 octobre 1924, accompagné d'un portrait de Breton dessiné par Man Ray. Martin du Gard y salue « une des figures les plus attrayantes de la génération en passe d’atteindre la trentaine, et d’une classe intellectuelle évidemment supérieure à celle de Goll et de Dermée », qui jouit sur ses fidèles de « l’autorité magnétique d’un Oscar Wilde ». L'éloge sera si marqué que l'article ne passera pas inaperçu auprès de Picabia : très mécontent de voir la paternité du surréalisme lui échapper, il écrit dans sa propre revue, 391, « ou M. Martin du Gard du Gard n'est au courant de rien, ou cet article a été écrit par André Breton » (391, n°19, « Opinions et portraits »), avant de signer « Francis Picabia, Metteur en scène du surréalisme d'André Breton ». Dans l'affirmation du groupe de la rue de Grenelle comme seul représentant légitime du surréalisme, Maurice Martin du Gard est donc un allié précieux ; aussi, voulant conserver cet allié de choix, le Bureau de recherches décide-t-il de le contacter par lettre le jour-même de la publication du compte rendu (Archives du surréalisme, T.1., p. 19).

L'échange de bons procédés (qui profitait plutôt aux surréalistes, mais le directeur des Nouvelles littéraires favorisait et aidait toujours les jeunes auteurs en priorité) ne s’est pas arrêté là : le 8 novembre 1924, le Communiqué du bureau de recherches surréalistes, dont Breton a conservé le brouillon (il en serait l'auteur d'après Marguerite Bonnet), est publié dans Les Nouvelles littéraires ; une lettre d'une certaine Mlle Coisnon, retrouvée dans les archives d'André Breton demande à s'abonner après avoir lu ledit communiqué. On rappellera qu'un numéro coûtait plus de deux mille francs à être édité, voire pouvait aller jusqu'à cinq mille francs du fait des clichés : la manne de deux cents francs des Nouvelles littéraires, ainsi que celles de Kra et de Gallimard, étaient plus que bienvenues.

Il n’y aura cependant guère d’autre collaboration entre les révolutionnaires, maintenant « lancés », et le représentant de l’intelligentsia littéraire : Breton se contentera de participer, le 9 mai 1925, à l'hommage rendu à Saint-Pol-Roux (poète qu'il admirait au point de lui dédier Mont de Piété) par Les Nouvelles littéraires. Par la suite, les échangent se musclent : après que Marin du Gard a rapproché, dans son compte rendu de Sur le fleuve d’amour, son auteur Joseph Delteil de Louis Aragon, celui-ci lui envoie une lettre d’insultes, publiée par Clarté (cinquième année, n°79-décembre 1925-janvier 1926) ; par la suite, accompagné de Breton et Benjamin Péret, Aragon saccagera les bureaux du directeur des Nouvelles littéraires. Dans son projet de chronologie pour un numéro spécialiste de Flair, en 1953 (projet avorté), Breton évoquera un procès « d’un million de dommages et intérêts » ; « mais, précise-t-il, au cours de l’instruction, son avocat, Maître Campinchi, après étude du dossier, abandonne la cause et le procès n’a pas lieu ».

La rupture consommée, Aragon, jamais en reste, reprendra ses moqueries contre sa revue dans Le Paysan de Paris (1926). Symptomatiquement, on trouvera des publicités pour Les Nouvelles littéraires jusqu'au n°5 de La Révolution surréaliste (octobre 1925). [Antoine Poisson, Site André Breton, 2021]

 

Creation date15/12/1924
Destination address
Bibliographical material

Ts, encre bleue - une page 297 x 210 mm, sur papier à en-tête des Nouvelles littéraires.

Enveloppe non conservée.

LanguagesFrench
Place of origin
Library

Bibliothèque littéraire Jacques Doucet, Paris : BRT 216

Size21,00 x 29,70 cm
Number of pages1 p.
Reference1392000
Keywords, , ,
CategoriesCorrespondence, Forwarded Correspondences
Set[Journal] La Révolution surréaliste, [Revue] La Révolution surréaliste, 1
Permanent linkhttps://cms.andrebreton.fr/en/work/56600101001651
Place of origin
Place of destination

See also

1 Work
 
False

La Révolution surréaliste, 2

-
Louis Aragon, Antonin Artaud, Georges Bessière, André Breton, René Crevel, Robert Desnos, Paul Éluard, Michel Leiris, Gérard Rosenthal, dit parfois Francis Gérard, Jacques Vaché
Pierre Naville, Benjamin Péret
Giorgio De Chirico, Pablo Picasso, Hénoque, dit Dédé Sunbeam
Man Ray

-

Deuxième numéro de La Révolution surréaliste, imprimé à Alençon et publié le 15 janvier 1925.

36 images, une notice descriptive, une exposition, une bibliographie, deux séries, des liens.

[Revue] La Révolution surréaliste, 2