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Lettre datée de Saint-Cirq, le 24 août 1951
Auteur
Auteur André BretonPersonnes citées Drahomira, Jindřich Heisler, Louis Breton, Benjamin PéretDestinataire Aube Breton, épouse Elléouët
Descriptif
Lettre d'André Breton à sa fille Aube datée de Saint-Cirq-Lapopie de 24 août 1951.
Transcription
St-Cirq, le 24 août 1951
Ma petite Aube, autant que je me rappelle — il y a déjà longtemps — tu m’as écrit une lettre de réprimandes et c’était même la première — tiens, tiens, tiens — que je recevais de toi. Je me suis dit qu’une semaine ou deux allait se passer et que tu atténuerais cela d’une gentillesse comme tu en as souvent : mais non, rien. Bon… Je ne vais pas discuter plus longuement avec toi. Je dirai seulement que tu es drôle quand tu m’accuses de te « décourager » : il n’est personne que je veuille au contraire encourager plus que toi mais pour cela je ne puis approuver en toi que ce que je trouve de meilleur et je maintiens que j’ai été déçu du peu d’efforts que tu as faits pour te maintenir dans une meilleure place à l’école. Je le déplore surtout en raison de tes promesses, tu m’obliges à le redire. Pas d’accord non plus sur ce que tu me dis à propos d’argent. Tu as reçu au cours de la dernière année et de moi et surtout de ton grand-père (que tu laisses sans nouvelles alors que tu sais qu’il est très vieux et assez gravement malade) des sommes bien plus que suffisantes pour que tu ne sois privée de rien. Si tu commences à ton âge à me connaître un peu, tu dois savoir que je n’ai pas misé ma vie sur l’argent. Je n’en débattrai pas avec toi plus qu’avec quiconque, ni aujourd’hui ni un autre jour.
Assez, je pense, sur ce sujet.
Je ne sais presque plus rien de toi, sinon que tu t’amuses, ce que je désire de tout mon cœur. Mais il me semble si étrange que tu sois si loin — je ne dis pas dans l’espace — toi que je vois, que je regarde dans les yeux tous les jours. Es-tu bien certaine de ne pas être passée de l’autre côté du miroir ? Très bien d’y passer, à condition de garder en main le fil qui ramène, tu sais.
Quand te proposes-tu de rentrer à Paris ? Il est arrivé hier ici, du lycée Jules-Ferry, la lettre ci-incluse. Je ne puis — j’espère que tu le comprendras ! — me procurer ici le certificat médical : il faut que tu te le procures à Cannes . Il te suffit donc d’y joindre l’enveloppe demandée, je pense que le timbre de 15 F ne sera pas un problème. J’ose du moins l’espérer.
Heisler et Drahomira sont encore avec nous à St-Cirq. Benjamin aussi. Nous comptons, Elisa et moi, partir pour Lorient vers le 10 septembre et être à Paris vers le 15.
Petite Aube , dis-moi quelque chose qui efface un peu cette ombre, non ? Qu’est-il donc arrivé au cœur que tu me dessinais toujours à la fin de tes lettres ? Mais non, n’est-ce pas, il est encore là-bas, parmi les jasmins.
Un baiser sur tes deux yeux.
André
Bibliographie
André Breton (éd. Jean-Michel Goutier), Lettres à Aube, Paris, Gallimard, 2009, p. 55-56
Librairie Gallimard
Date de création | 24/08/1951 |
Date du cachet de la Poste | 24/08/1951 |
Adresse de destination | |
Provenance | Saint-Cirq-Lapopie, Lot |
Lieu d'origine | |
Bibliothèque | Bibliothèque littéraire Jacques Doucet, Paris : Ms Ms 41363_51 |
Modalité d'entrée dans les collections publiques | Don Aube et Oona Elléouët à la Bibliothèque littéraire Jacques-Doucet, Paris, 2003 |
Crédit | © Aube Breton, Gallimard 2009 |
Référence | 19004937 |
Mots-clés | lettre, Saint-Cirq-Lapopie |
Catégories | Correspondance, Lettres d'André Breton |
Série | [Correspondance] Lettres à Aube |
Lien permanent | https://cms.andrebreton.fr/fr/work/56600101000097 |