Descriptif
Lettre d'André Breton à sa fille Aube, écrite le 12 octobre 1948. Expédiée de Paris à Putney, aux États-Unis.
Paris, 12 octobre 1948
Ma petite Aube chérie,
Cette fois c’est moi qui suis en retard avec toi mais on était à peine revenus de l’île de Sein qu’on a été tous les deux pris par la grippe et cela m’a redonné de la sinusite comme il y a deux ans ; impossible d’écrire et même de lire. Maintenant ça va mieux, bien que la fameuse fenêtre sur l’escalier ne ferme toujours pas et qu’on soit constamment enrhumés. Cette fenêtre je ne la déteste pas cependant parce qu’il y a au-dessous d’elle un cœur dessiné au crayon avec une inscription de mon petit chéri. Alors j’aime encore mieux qu’on ne repeigne pas l’escalier.
On a bien reçu les lettres où tu nous parles de tes collections de papillons pendant les vacances et où tu nous donnes tes premières impressions sur l’école de Putney. Je suis si heureux de savoir que tu t’y trouves bien. Je suis persuadé que tu vas trouver ce qu’on y apprend beaucoup plus intéressant qu’à Roxbury et que tu vas faire des progrès formidables. Quel âge ont tes petites compagnes ? Est-ce que tu tiens un bon rang parmi elles ? Raconte-nous tout ce que nous ne savons pas encore de ton emploi du temps. Je voudrais bien que tu me fasses une espèce de petit agenda avec les heures de la journée pour que je puisse te suivre dans le temps. Il suffirait que tu m’écrives par exemple : telle heure lever, telle heure petit déjeuner (et de quoi il se compose), telle heure ouverture des cours (et quels cours à peu près), telle heure récréation (et à quoi l’on joue), telle heure déjeuner (et ce qu’on mange) et ainsi de suite jusqu’au soir. C’est cela qui me ferait plaisir, tu sais !
Ma petite Aube, il y a si longtemps que tu n’as pas écrit à ton grand-père. Il en est bien triste, tu sais. Rappelle-toi, par exemple, comme il était content de t’offrir une bicyclette. Et tu sais bien qu’il n’est rien qu’il ne ferait pour toi. D’ailleurs il ne faut pas que ce soit la raison de lui écrire, mais seulement qu’il est ton grand-père, qu’il est très vieux et très seul, presque privé de toute joie et qu’il est très gentil. J’espère que tu te rappelles encore son adresse : M. Louis Breton, 13 rue Le Bourgo, Lorient (Morbihan).
On a été si heureux de recevoir tes photographies mais tu sais que tu ne nous as pas dit grand-chose de ton petit frère. J’aurais été si intéressé de savoir ce que tu avais ressenti en le voyant, est-ce que c’était comme tu imaginais ? Quand dois-tu le revoir ? Pas avant Noël, je pense ? Est-ce que Jacqueline a pu venir te faire une petite visite ? À quelle distance est Putney de New York ?
En voilà des questions, n’est-ce pas ? Mais, tu comprends, il y a une foule de choses que je voudrais savoir de toi et que tu ne penses pas forcément à me dire. Alors je crois que si tu prenais ma lettre sous les yeux au moment d’y répondre, tout de suite je ferais un grand pas dans la connaissance de tout ce qui te concerne.
On s’est très bien plu à l’île de Sein avec Péret et nos autres amis Heisler et Toyen, je crois te l’avoir dit. On est revenu par Lorient où l’on a passé trois jours chez ton grand-père. J’ai recommencé à travailler dès mon retour : pour l’instant je m’occupe surtout de publier un almanach d’« art brut ». Tu te demandes peut-être ce que ça peut être que l’art brut ? Cela groupe tous les tableaux et objets que font quelquefois des gens qui ne sont pas artistes : par exemple un plombier zingueur, un jardinier, un charcutier, un fou, etc. C’est extrêmement intéressant. J’ai publié aussi un livre sur la Martinique et d’ici quelques jours paraîtra de moi un gros livre de poèmes. Elisa vaque à ses occupations du matin. Elle est joliment enrhumée, entre parenthèses. La voilà maintenant au téléphone (pour une fois ce n’est pas « la Paternelle », tu sais que ça continue !).
Au revoir, mon très cher Petit, toujours mon très cher Petit. On t’embrasse le plus tendrement.
P.-S.- Darling, I am writing to you these days - received your long letter. You are always in my heart. Elisa
Date de création | 12/10/1948 |
Notes bibliographiques | André Breton (éd. Jean-Michel Goutier), Lettres à Aube, Paris, Gallimard, 2009, p. 34 |
Notes | Contrairement à ce qu'indique l'édition Gallimard, l'enveloppe ne correspond pas à la lettre : l'enveloppe porte la date du 1er septembre 1948, la lettre celle du 12 octobre 1948. La lettre postée le 1er septembre n'est pas conservée. En revanche, il est ici fait allusion à une lettre antérieure « Je crois te l'avoir dit ».
L'enveloppe de cette lettre du 12 octobre 1948 n'est pas conservée. D'après le premier paragraphe de la lettre, elle a sans aucun doute été adressée à Putney, l'école où Aube était inscrite cet automne-là : « ... Quand dois-tu le revoir [ton petit frère] ? Pas avant Noël, je pense ? » [site André Breton, 2018] |
Provenance | Paris |
Lieu d'origine |
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Bibliothèque | Bibliothèque littéraire Jacques Doucet, Paris : Ms Ms 41363_31 |
Modalité d'entrée dans les collections publiques | Don Aube et Oona Elléouët à la Bibliothèque littéraire Jacques-Doucet, Paris, 2003 |
Crédit | © Aube Breton, Gallimard 2009 |
Référence | 19004925 |
Mots-clés | art brut ou naïf, correspondance, martinique, poésie |
Catégories | Correspondance, Lettres d'André Breton |
Série | [Correspondance] Lettres à Aube |
Lien permanent | https://cms.andrebreton.fr/fr/work/56600101000048 |
Lieu d'origine
Notice reliée à :
3 Œuvres
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André Breton
Récit poétique d'André Breton, illustré de textes et de dessins d'André Masson, publié au Sagittaire en 1948.
Deux images, une notice descriptive, un lien.
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André Breton
Récit d'André Breton paru en 1948 aux éditions Sagittaire.
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