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N° 164

Tableau

Auteur

Artiste Fleury Joseph Crépin

Descriptif

Huile sur toile de 1941 par Fleury-Joseph Crépin, peintre associé à l'art brut et proche des milieux spirites.

Signée en bas à gauche : Crepin Fleury Joseph ; annotée à droite : Crepin. Fy. Jh, 29-12-1941, n° 164

André Breton découvrit Joseph Crépin en 1948, à l'occasion des premières manifestations de l'art brut.
« Sa méthode de travail est la suivante : il se borne à reporter sur toiles les dessins de ses cahiers en les agrandissant au besoin. Il a conscience de n'être pour rien dans le choix et la distribution des couleurs ; c'est comme si on l'amenait à mettre telle ou telle couleur à telle place. De la sorte il est quitte de toute hésitation comme de tout repentir : aussi bien, observe-t-il, il n'a jamais "manqué un tableau"...

» Dans l'œuvre de Crépin, la figuration humaine est pratiquement réduite à la tête et au cou, comme dans les tableaux du mineur Lesage de 1927-1928, mais chez lui cette tête offre un caractère moins conventionnel et bien autrement inquiétant (plus en rapport avec les grimoires qu'avec les livres de piété). Il arrive du reste qu'ici ou là elle soit soutenue et comme flairée par des bêtes d'aspect larvaire qui ne sont pas sans présenter des analogies de forme avec celles qu'on découvre dans le tableau de Lesage, intitulé Le grand Esprit de la Pyramide (1927), comme avec les "souris-mangues" issues de la libido de Wölfli.

» Les "temples" de Joseph Crépin ont ceci de commun avec le Palais idéal du facteur Cheval qu'ils ne comportent pas, à proprement parler, d'"intérieur" et d'"extérieur", ou que cet intérieur et cet extérieur sont comme imbriqués l'un dans l'autre. Ils se dressent dans un espace où ce qui est présumé "derrière" communique au point de ne faire qu'un avec ce qui est présumé "devant" comme ce qui est présumé "dessus" avec ce qui est présumé "dessous" et où rien ne porte ombre, jamais. Ils constituent un des plus beaux fleurons de l'art médianimique. » André Breton (Le surréalisme et la peinture, Nouvelle édition revue et corrigée, 1928-1965, Paris, Gallimard, 1965, pp. 298-307)

Art Brut
« Dans ce véritable manifeste de l'Art brut que constitue la notice datée d'octobre 1948, notre ami Jean Dubuffet insiste on ne peut plus justement sur l'intérêt et la spéciale sympathie que nous portons aux œuvres qui "ont pour auteurs des gens considérés comme malades mentaux et internés dans des établissements psychiatriques". Il va sans dire que je m'associe pleinement à ses déclarations : "Les raisons pour lesquelles un homme est réputé inapte à la vie sociale nous paraissent d'un ordre que nous n'avons pas à retenir." Je me déclare en non moins parfait accord avec Lo Duca, auteur d'un remarquable article intitulé L'Art et les Fous qu'on m'a communiqué sans malheureusement pouvoir m'en indiquer la référence et dont je me bornerai à citer ces fragments : "Dans un monde écrasé par la mégalomanie et l'orgueil, par la mythomanie et la mauvaise foi, la notion de folie est bien imprécise." On a d'ailleurs remarqué qu'un nombre excessivement restreint de mégalomanes est soigné par les psychiatres. En effet, dès que la folie devient collective - ou se manifeste par le truchement de la collectivité - elle devient taboue... À nos yeux, le fou authentique se manifeste par des expressions admirables où jamais il n'est contraint, ou étouffé, par le but raisonnable. Cette liberté absolue confère à l'art de ces malades une grandeur que nous ne retrouvons avec certitude que chez les Primitifs...

» Il est à observer qu'une gêne croissante, dès qu'il s'agit de la place à faire à de telles œuvres, n'a cessé depuis un demi-siècle de s'exprimer dans les milieux psychiatriques - soit dans un cercle où pourtant ces œuvres étaient essentiellement considérées en fonction de leur valeur clinique. Déjà dans son ouvrage L'Art chez les fous, publié en 1905, Marcel Réja s'oppose à ce que leur qualité maladive les fasse tenir pour "des choses hors cadre, sans rapport avec la norme" et se montre sensible à la beauté de certaines d'entre elles. Hans Prinzhorn (Bildnerei des Geistenkranken, 1922) en révélant celles qui lui paraissent les plus remarquables - notamment d'August Neter, de Hermann Beil, de Joseph Sell et de Wölfli - et en leur assurant une présentation pour la première fois digne d'elles, appelle leur confrontation avec les autres œuvres contemporaines, confrontation qui, sous bien des rapports, tourne au désavantage de celles-ci...

» Je ne craindrai pas d'avancer l'idée, paradoxale seulement à première vue, que l'art de ceux qu'on range dans la catégorie des malades mentaux constitue un réservoir de santé morale. Il échappe en effet à tout ce qui tend à fausser le témoignage qui nous occupe et qui est de l'ordre des influences extérieures, des calculs, du succès ou des déceptions rencontrées sur le plan social, etc. Les mécanismes de la création artistique sont ici libérés de toute entrave. Par un bouleversant effet dialectique, la claustration, le renoncement à tous profits comme à toutes vanités, en dépit de ce qu'ils présentent individuellement de pathétique, sont ici les garants de l'authenticité totale qui fait défaut partout ailleurs et dont nous sommes de jour en jour plus altérés. » André Breton (Le Surréalisme et la peinture, Nouvelle édition revue et corrigée, 1928-1965, Paris, Gallimard, 1965, pp. 313-316)

Expositions


- Cahors, Musée de Cahors, Changer la vue, André Breton et la révolution surréaliste du regard, 1986, rep. p.8, n° 39, p. 7 (étiquette au dos)
- Villeneuve d'Ascq, Musée d'art moderne de Lille Métropole, Fleury Joseph Crépin, Rétrospective, 2000, rep. p. 152, n° 114

Bibliographie

- André Breton, Le Surréalisme et la peinture, Nouvelle édition revue et corrigée, 1928-1965, Paris, Gallimard, 1965

Date de création1941
Date d'édition1941
Languesfrançais
Notes62,8 x 50,9 cm (24 3/4 x 20 in.) - Huile sur toile, cadre par l'artiste
Dimensions62,80 x 50,90 cm
Référence2911000
Vente Breton 2003Lot 4010
Mots-clés, ,
CatégoriesŒuvres graphiques
Lien permanenthttps://cms.andrebreton.fr/fr/work/56600100359440