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Gouache et crayon sur papier datée de 1880, acquise par André Breton lors de la deuxième vente d'œuvres d'Aloys Zötl à Drouot en 1956.
Œuvre annotée en bas à droite : Alois Zötl fecit am 2. Oktober 1880 ; en bas à gauche : Fische Pas. 14 ; en bas au centre : Die Spitznase Raja oxyrhinchus von unten.
Lors de la présentation de la deuxième vente des aquarelles d'Aloys Zötl, André Breton associe le nom de l'artiste autrichien à celui du Douanier Rousseau comme suit :
« La dispersion récente, en vente publique, de la première moitié des œuvres constituant l'atelier d'Aloys Zötl, artiste jusqu'alors inconnu, a donné la mesure de la séduction qu'elles exercent et qui d'emblée s'est traduite par les plus vives compétitions entre amateurs. Cette deuxième et dernière vente, en proposant cent soixante-dix aquarelles de non moindre qualité, ne peut que bénéficier d'un surcroît de faveur.
« Faute de tout autre détail biographique en ce qui le concerne, on ne peut que rêver très librement à ce qui put conditionner l'entreprise de cet ouvrier teinturier de Haute-Autriche qui, de 1832 à 1887, mit un tel zèle à dresser le plus somptueux bestiaire qu'on eût jamais vu. Tout se passe comme si, l'œil rompu professionnellement à la plus subtile sélection des couleurs et de leurs tons, Zötl était entré en possession d'un prisme mental fonctionnant comme instrument de voyance et lui dévoilant en chaîne jusqu'à ses plus lointains spécimens le règne animal dont on sait quelle énigme il entretient en chacun de nous et le rôle primordial qu'il joue dans le symbolisme subconscient. "Le monde des animaux, a dit Lamartine, est un océan de sympathies dont nous ne buvons qu'une goutte, quand nous pourrions en absorber par torrents."
« De cet océan de sympathies n'émergeaient encore que les "jungles" d'Henri Rousseau, lequel s'apparenterait à Zötl à plus d'un titre. De même qu'aujourd'hui, à New York, on commet plaisamment des experts botanistes à savoir si le Douanier a pu entrer en contact direct avec la végétation tropicale, ce serait bien en vain qu'on chercherait à partir de quels documents, sans doute rarement pris sur le vif, Zötl a retrouvé cette parfaite concordance organique de l'animal et de son habitat, dont il est l'hiéroglyphe vivant. La merveille est que l'un se montre ici constamment fonction de l'autre et que, par la vertu d'une exceptionnelle ferveur, Zötl nous rende au sentiment de l'harmonie universelle, refoulé au plus profond de nous. » André Breton (Le surréalisme et la peinture, Nouvelle édition revue et corrigée, 1928-1965, Paris, Gallimard, 1965, p. 354-355).
Aloys Zötl
« Mais la grande leçon du peintre autrichien, il est bien évident qu'il faut la chercher plutôt dans les œuvres où s'établit, entre l'animal et le décor naturel qui l'environne, une profonde harmonie [...]. Et de ce point de vue de l'harmonie naturelle, c'est tout simplement à la prise en considération des vertus proprement artistiques d'Aloys Zötl que l'on en vient, car c'est dans ses œuvres les plus admirables qu'il parvient à tresser les "correspondances" les plus convaincantes entre les êtres et le paysage, cela n'étant possible qu'en mettant à contribution une intuition proprement poétique faute de laquelle la documentation puisée par lui dans les ouvrages d'histoire naturelle ou les récits de voyages serait demeurée lettre morte. Ce qui revient à dire que les qualités plastiques sont ici inséparables des qualités du cœur et de l'esprit, chose que l'on a trop peu l'occasion de dire aujourd'hui en présence du dessèchement général de ce qui se propose le plus souvent sous l'étiquette de l'"avant-garde". Mais alors comment choisir entre tant de merveilles ? Tant pis ! Je propose ici mon choix personnel qui, loin de se vouloir autoritaire et définitif, est au contraire invitation à tout un chacun à dresser le sien, d'abord parce que la beauté est affaire personnelle [...] et ensuite parce que les affinités que nous pouvons ressentir à l'égard de telle ou telle espèce animale procèdent de raisons qui échappent souvent à notre conscience.
« J'aime [...] Le Semnopithèque de 1839..., La Loutre et Rana varia (l'un des plus beaux Max Ernst que je sache) de 1863, [...] Le Rhinocéros de 1872 (ô puissante merveille de lourdeur et de grâce) [...].
« Mais par-dessus toutes ces incontestables réussites je mettrais trois œuvres qui valent par des qualités très différentes : Le Caïman de 1849 tout d'abord qui, à mes yeux, est le chef-d'œuvre des chefs-d'œuvre, tant par la prodigieuse invention de chaque détail que par la rigueur poétique absolue de sa composition ; puis un animal fort peu exotique d'allure puisqu'il s'agit de L'Ondatra musqué de 1871, dont je goûte au contraire l'extrême simplicité de la mise en page et l'égalité d'importance qui s'établit entre le corps de l'animal et l'îlot où il a pris place ; enfin Les Paresseux de 1874 en raison du foisonnement baroque de sa végétation autour d'eux, de la diversité des attitudes et de je ne sais quelle sympathie que je devine ici entre les animaux et végétaux. Faut-il ajouter que dans toutes ces œuvres, le pinceau d'Aloys Zötl établit tout naturellement des affinités entre les herbes et les poils, des "rimes" entre tel organe [...] et telle fleur. Et jamais l'aquarelle sans doute n'avait été aussi fidèle à ses vertus de transparence habituelle en se découvrant de si grandes possibilités pour évoquer la douceur des pelages et des plumages.
« Julio Cortazar illustre superbement dans le présent ouvrage l'affirmation du poète selon laquelle "le règne animal...entretient en chacun de nous" une "énigme" et qu'il "joue" un "rôle primordial" dans notre "symbolisme inconscient". Et peut-être revient-il à chaque lecteur de ce livre de choisir avec quel animal d'Aloys Zötl il lui serait possible, comme l'écrivain argentin avec son fameux Axolotl, d'échanger sa place. » José Pierre (Julio Cortazar (texte de), Giovanni Mariotti (introduction de), José Pierre (postface de), Aloys Zötl (1803-1887), Milan, Franco Maria Ricci, 1976, p. 140-144).
Expositions
- Wien, Österreichisches Museum für angewandte Kunst
- Zürich, Kunsthaus Zürich
- Bruxelles, Palais des Beaux-Arts, L'Autriche visionnaire, 1996/1998, s.p., s.n°
Bibliographie
- Paris, Hôtel Drouot, Me Rheims, L'atelier Aloys Zötl, deuxième et dernière vente, 3 mai 1956, n° 67
- Julio Cortazar (texte de), Giovanni Mariotti (introduction de), José Pierre (postface de), Aloys Zötl (1803-1887), Milan, Franco Maria Ricci, 1976, rep.p. 131, p. 153
Le Bestiaire de Zötl
Date de création | 1880 |
Date d'édition | 1880 |
Langues | français |
Notes | 44,6 x 55,5 cm (17 5/8 x 21 7/8 in.) - Gouache et crayon sur papier |
Provenance | Acquise à la deuxième vente aux enchères publiques d'aquarelles d'Aloys Zötl, Hôtel Drouot, 3 mai 1956 |
Référence | 2067000 |
Vente Breton 2003 | Lot 4428 |
Mots-clés | art brut ou naïf, arts graphiques, peinture, vente |
Catégories | Tableaux |
Exposition | L'Atelier d'Aloÿs Zötl |
Lien permanent | https://cms.andrebreton.fr/fr/work/56600100991040 |