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Accueil > Œuvres > Le suicide est-il une solution ?Le suicide est-il une solution ?
Auteur
Auteurs Maxime Alexandre, Louis Aragon, Maurice David, Fourest, Fernand Gregh, Marcel Noll, Léon Pierre-Quint, Paul Valéry, René Crevel, Paul Recht, Pierre ReverdyRecueilli par André BretonPersonnes citées Michel Arnaud, Henri Baranger, Georges Bessière, André Biane, Jérôme Cardan, Jacques Casanova, Benjamin Constant, Fernand Divoire, Josef Florian, Pierre Guéguen, Francis Jammes, Marcel Jouhandeau, Oskar Kokoschka, Pierre de Massot, Pierre Naville, Georges Polti, Alphonse Rabbe, Jacques Vaché, Clément Vautel, Victor Marguerite, Léon Werth, Antonin Artaud, Théodore Jouffroy, André Masson, Jean PaulhanPhotographies de Man Ray
Descriptif
Collage des réponses à l'enquête sur le suicide lancée par les surréalistes pour le deuxième numéro de La Révolution surréaliste (janvier 1925).
Collage réalisé et commenté par Breton, Aragon et une troisième main (Naville ?).
Dès le premier numéro de La Révolution surréaliste, Péret annonçait : « J’approuve tout à fait les propositions de Breton. J’estime qu’il y a lieu de réserver six à huit pages aux suicides... » Le suicide constitue ainsi le fil rouge du premier numéro émaillé par Aragon de faits divers sur le même sujet (par exemple « La suicidée au parapluie », ou cinq coupures nommées « Les désespérées »). La question, il est vrai, est à la mode depuis l’ouvrage de Durkheim, paru en 1897 : Le Suicide. Cependant, la perspective de l’enquête demande au sujet interrogé de dire ce qu’il ressent – c’est-à-dire reprendre la main sur ce qui l’afflige. Faisant fi de la rationalité, de la méthode scientifique, de la froide considération, elle va récolter, avec un « désir d’archives », des informations sur des pans de la réalité jusqu’ici inconnus. On est frappé, à la suite de Pierre Naville, par le « sérieux des réponses », parfois bouleversantes comme l’aveu de Crevel d’un désir de mort : « Ne trouvant point de solution dans la vie, en dépit de mon acharnement à chercher, aurais-je la force de tenter encore quelques essais si je n’entrevoyais dans le geste définitif, ultime, la solution ? » Les réponses choisies en fin de recension sont exemplaires du lyrisme des surréalistes, celui de l’expérience, de l’impensé, de l’inavouable ; on sait que ceux-ci s’étaient opposés à un art cynique, réaliste, ironique (l’esprit d’Anatole France, par exemple). En vérité, à l’inverse des réponses de l’enquête littéraire, l’enquête sur le suicide pousse à l’aveu. Et les surréalistes de citer la figure lyrique de Senancour, dont ils évoquent (sans la reproduire) la lettre XLI d’Obermann, en commentant : « Qui donc prétendait que nous vivions en plein romantisme ? Cette grande voix sincère, et qui s’est tue, peut-être en retrouvons-nous l’écho chez quelques-uns. » Après avoir posé la question du suicide et réfuté des arguments classiques (caractère criminel de l’acte ; rôle de Dieu ; rôle de la nature dans la création de la vie), la lettre annonce surtout un discours clair, véritable, sans mensonge, dont se revendiquent les surréalistes : « Dites-moi clairement, sans vos détours habituels, sans cette vaine éloquence des mots qui ne me trompera pas, sans ces grands noms mal entendus de force, de vertu, d’ordre éternel, de destination morale ; dites-moi simplement si les lois de la société sont faites pour le monde actuel et visible, ou pour une vie future, éloignée de nous ? »... Nul doute que c’est ce « discours clair », sans « détour » ni « vaine éloquence » que cherchent ici les surréalistes, au risque même d’une certaine « naïveté » cent mille fois préférable à l’ironie d’Anatole France.
L'idée de l'enquête est née en octobre 1924, sous le titre « Vivre ou mourir ? ». Le 3 novembre, l'imprimeur reçoit le texte des bulletins. Le 14, les surréalistes les envoient à toutes leurs connaissances, personnalités et revues susceptibles d'être intéressées. L'enquête souleva sans doute l'intérêt du public car, deux mois plus tard, les réponses sont publiées. Le groupe se plaît à multiplier les moyens d'expression, puisque Man Ray, comme Kokoschka, donnent un dessin en guise de réponse ; De Chirico, le 29 novembre, avait promis d'en envoyer une quinzaine, mais ne donnera qu'une illustration pour le texte de Pierre Naville ; un dessin de Max Ernst, envoyé à cet effet, n'a pas été retenu. L'enquête multiplie les références, que ce soit Senancour, Rabbe ; d’un ton très personnel, elle traite sans égards les réponses insatisfaisantes, fait la part belle aux réponses lyriques, comme celles d'Artaud, instigateur de l’enquête selon Pierre Naville (« Et très certainement je suis mort depuis longtemps, je suis déjà suicidé ») ou de Crevel. Les archives d'André Breton permettent de lire la lettre originale d'Alexandre Biane, reproduite dans le numéro, mais aussi une lettre de Breton à Doucet envoyée le 28 décembre 1924, en pleine conception de la revue, qui s'avère plus lyrique et personnelle que la citation de Jouffroy donnée en guise de réponse. Le thème de la mort, de fait, semble travailler le numéro en entier : outre une nouvelle de Jacques Vaché, accompagnée d'un autoportrait à la plume, le numéro propose une défense anonyme de l'opium, qui se trouve être de la main d'Artaud. [Antoine Poisson, Site André Breton, 2022]
Bibliographie
Divers, « Le suicide est-il une solution ? », La Révolution surréaliste, n°2, janvier 1925, p. 8-15.
Date de création | sd, circa 1925 |
Notes bibliographiques | Manuscrit autographe ; fragments autographes, imprimés, collés, copiés ou dactylographiés.
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Langues | français |
Bibliothèque | |
Modalité d'entrée dans les collections publiques | Collection Jacques Doucet. |
Nombre de pages | 16 p. |
Mots-clés | enquête ou questionnaire, revue, revue "la révolution surréaliste", édition |
Catégories | Manuscrits, Manuscrits des membres du groupe |
Série | [Revue] La Révolution surréaliste, 2 |
Lien permanent | https://cms.andrebreton.fr/fr/work/56600101002007 |