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[Eh bien, eh bien où est-­on, on ne se lève plus, etc...]

Lettre datée du 6 février 1925

Correspondance

Auteur

Auteur André Breton
Personnes citées Louis Aragon, Jacques Baron, Jacques Doucet, Michel Leiris, Philippe Soupault, Roland Tual
Destinataire Simone Kahn, ép. Breton puis Collinet

Descriptif

Lettre d'André Breton à Simone Kahn, datée du 6 février 1925.

 

Transcription

6 février 1925

Eh bien, eh bien où est-­on, on ne se lève plus, etc. Mais non, n’est-­ce pas, la petite chérie n’est pas là. Ce matin, par exemple, je t’embrasse bien fort et puis j’ai absolument besoin de t’entendre rire. C’est étonnant ce qu’on entend peu rire autour de soi, ne trouves-­tu pas ?

Je t’ai écrit bien mal avant-­hier, à ce qu’il me semble. Comment vas-­tu, mon chéri ? Il faut me parler un peu plus que cela. Moi je me lève et, tu vois, je te parle aussitôt.

J’ai reçu mes épreuves de Commerce. Cela fait trente bonnes pages. Je suis assez content de ce texte, c’est même inquiétant. Peut-­être que le voir imprimé va m’inciter à lui donner une suite, quoique le vrai Discours ait l’air de m’avoir fui définitivement et que selon toute probabilité il y aura autre chose à la place.

Aragon continue à voir Doucet sous différents prétextes de manuscrits à lui vendre, de Baron, de Tual, de Leiris. Moi, cela m’est tout à fait impossible. Quelle vieille bête que cet homme, il me dégoûte de plus en plus.

J’attends la déclaration-­manifeste qui doit paraître aujourd’hui. Il faut voir si c’est si bien.

Soupault est venu hier à Cyrano. Il s’étonne de ce qui lui arrive  : plus je vais, plus ce que j’écris est mauvais. Il se sent tendre à la nullité

Je vois très peu de gens depuis que tu es partie. Jamais personne le soir, ou presque. Il ne faudra plus dire que c’est pour moi que tout le monde vient.

Hier après-­midi, Aragon et moi avons passé un moment chez Madame Meyer-­Rigaud. Quelle étrange femme. Elle écrit sur du papier à compliments, tu sais, ce papier à dentelle et à bouquet et à mains qui se serrent dans le bouquet. C’est d’ailleurs très joli. Mais quels drôles d’amis elle paraît avoir, quelle vulgarité la leur ! Et comme elle doit s’ennuyer.

Aragon ne sort plus guère le soir. Il explique maintenant que c’était le mois de janvier, l’époque du nouvel an qui l’entraînait à ces mondanités.

Les gens qui se disent mon père et ma mère viennent de rentrer à Paris et j’ai dû les voir hier soir. Ils ont ramené de Lorient l’ignoble cabot que tu sais. Le sinistre trio se propose de séjourner rue du Montparnasse jusqu’au mois d’avril.

À bientôt, mon cher petit, ne me raye pas trop impitoyablement de ton existence. Pourquoi ne veux-­tu pas te faire photographier là-­bas pour moi ?

J’ai été voir Monte là-dessus que j’ai trouvé (naturellement) très mauvais. Mais j’attends Surcouf (à partir du 20 février).

Fermez maintenant les yeux, sans tricher.

André

 

 

Bibliographie

André Breton, Lettres à Simone Kahn, ed. Jean-Michel Goutier, coll. « Blanche », Gallimard, Paris, 2016, p. 235-236.

Librairie Gallimard

Date de création06/02/1925
Date du cachet de la Poste06/02/1925
Adresse de destination
Languesfrançais
Crédit© Successions André Breton, Simone Kahn et éditions Gallimard
Référence0123463
Mots-clés, ,
CatégoriesCorrespondance, Lettres d'André Breton
Série[Correspondance] Lettres à Simone Kahn, [Revue] La Révolution surréaliste, 3
Lien permanenthttps://cms.andrebreton.fr/fr/work/56600101001876
Lieu d'arrivée